Le groupe bordelais Pretty Inside arrive à point nommé avec son troisième album “Ever Gonna Heal” pour rappeler qu’un disque n’est pas seulement un accessoire jetable mais le support d’une expérience commune, un miroir existentiel où se croisent et se clashent les vécus et sentiments de ceux qui les créent comme de ceux qui les écoutent.
“Ever Gonna Heal” ne s’embarrasse pas des chapelles musicales et réussit le pari de faire cohabiter influences, esthétiques et tricks variés. Alexis Deux-Seize a plongé le nez dans la folk des années 1960 aux années 1990, dont il a gardé une forme de décharnement, d’épure, d’évidence mélodique. On croise ainsi à plusieurs endroits la figure tutélaire d’Elliott Smith (Please don’t hide from the Sunbeams ou Ever Gonna Heal). Le travail sur le son, des guitares et des voix en particulier, facilité par une maniaquerie d’orfèvre au bord de la rupture évoque l’ombre de Nine Inch Nails ou Swans, modèles avoués dans l’approche d’un morceau comme une cathédrale sonore où la puissance n’existe jamais au détriment des sentiments (The Person that I hate, Skin). On y croise aussi des bricolages sonores et petites arnaques outsider du type de celles qui ont fait des miracles chez Sparklehorse, Dinosaur Jr. ou Guided by Voices (Really Diggin’ you, Bojack Sparklehorse Man).